† Taïma Mansi †

On dit parfois que les pires sadiques sont ceux dont l'on douterait le moins. Peut-être est-ce bien vrai. Qui pourrait songer aux horreurs qu'ont vu les jolis yeux bleus de Taïma ? Des horreurs dont elle-même était l'auteur...

Oh, la jeune femme paraît si fragile, si inoffensive, qu'il serait difficile de ne pas vouloir la prendre dans ses bras pour soulager sa peine. Son visage angélique s'illumine de sourires délicats, de rires cristallins. Elle dégage une impression de pureté et d'innocence qui font souvent oublier qu'elle n'est plus une enfant. Pourtant, derrière cette candeur, elle est nimbée d'une aura hypnotique et sensuelle, pleine d'une étrange maturité. Elle paraît souvent impulsive, enthousiaste, peut-être même un peu excentrique et fantasque. Elle vit dans un monde un peu à part, un monde où la moindre chose recèle la beauté, même les plus sombres.
Mais ne vous méprenez pas, la belle n'est pas aussi frivole qu'elle le paraît. Chaque rose a ses épines, certaines se les sont simplement faites arracher. Et rarement épine n'a été plus dangereuse. Taïma est une manipulatrice féroce, qui agit selon ses intérêts personnels, qui bien souvent sont de l'ordre du divertissement. La vie n'est qu'un jeu, et elle ne se prive pas de la moquer. Ce n'est qu'un fil qui se rompt lentement. Qui s'use trop simplement, trop rapidement. Elle ne vaut pas la peine qu'on s'attarde à la souffrir. C'est un jeu, un jeu de funambule. La jeune femme n'en a rien à faire de la vie. Elle s'en contrefiche autant que de savoir si demain existera. Elle, elle n'est qu'une funambule, et elle est là, gonflée d'adrénaline, à jouer entre vie et mort, à rire au-dessus de cette abîme aussi obscure qu'elle-même. Et elle adore ça. Alors, méfiez-vous, lorsqu'elle vous susurrera de sa voix chaude et mélodieuse, au timbre si envoûtant et irrésistible, les mille délices d'un Paradis hypocrite. Méfiez-vous. Elle vous tuera.

Taïma n'est pas innocente. Taïma est loin d'être pure. Le sang souille ces mains qui ont caressé avec douceur bien des visages, ceux-là même qui ont fini au fond des eaux noires. La cruauté attise les flammes avides de son cœur sanguinolent, trop déchiré pour battre encore. Elle sait seulement jouer ce jeu funeste, cracher à la gueule de la Vie. Une âme ? L'âme n'est qu'un reflet qui s'attarde dans l'eau, elle n'est rien qui nous appartienne vraiment. Son esprit torturé est las. Elle s'épuise à vouloir vivre et mourir, à subsister dans cet état de semi-mort permanente. Personne ne vit, au fond. Chacun ne fait que survivre. Et même elle, même elle qui joue avec la vie sans cesse, elle n'avait jamais vécu. Mais c'était ainsi qu'elle est. C'était ainsi qu'elle subsiste. Morte à l'intérieur.